Les billets de Joseph

Les billets de Joseph

Plus que parfait

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Son nom est Pesquet. Thomas Pesquet.

 

Il a trente-huit ans, plutôt bien fait de sa personne, ingénieur, il est surtout le dixième astronaute à quitter le plancher des vaches tricolore,  au cas où vous seriez arrivés jusqu'ici à l'ignorer, ce qui relèverait de la performance.

 

Un jeune homme moderne, bien dans son époque, il communique donc, beaucoup, beaucoup. D'abord parce qu'il est payé pour, cela fait partie de son boulot pour l'Agence Spatiale Européenne qui l'a emmené là-haut, puis aussi pour le Centre National d’Études Spatiales pour lequel il conduira de multiples expériences dans l'apesanteur de l'International Space Station, l'ISS pour les initiés. Il a son blog dédié sur le site de l'ASE, comme il avait son journal de bord dans la revue « Ciel et Espace » avant de partir. Nous détaillant le récit de son aventure depuis le début, c'est bien écrit, exhaustif, intéressant, et même drôle, car le bougre maîtrise tout, même l'humour. Vous sentez une pointe de jalousie, allons, allons, comme vous y allez.

 

C'est pas du faux, cette image, il semble bien avoir quelque chose dans le crâne, du consistant, contrairement à certains ambitieux énervés qui se vantaient d'avoir plusieurs cerveaux, lui n'en a qu'un, mais il est toujours distancié, positif, et s'exprime simplement. Il le confirme avec ses comptes tweeter et FB qu'il prend soin d'alimenter régulièrement. Le récit de son aventure est de la bonne communication, -avec la pub et les spin doctors, on ne savait plus que ça existait-, elle donne envie, prône du positif, comme nombre de livres, de films ou de blogs d'aventuriers explorateurs avant lui. Bon, ses journées doivent durer soixante-douze heures, pour produire autant de contenus, ben oui il doit pas être tout seul, il prend aussi des -belles- photos, fait des vidéos de bon niveau ( d'autres autres le font aussi me direz-vous). Le temps s'allongerait dans le vide, que cela ne m'étonnerait pas

 

Si je vous disais qu'il est aussi titulaire d'une licence de pilote de ligne et ultra sportif, vous trouveriez cela presque normal (ouf, enfin!). Il vit en union libre, cela vous confirmera qu'il est bien notre contemporain, presque comme nous, quoi, mais un objet de désir accessible mais trop lointain pour ceux et celles qui souhaiteraient lui faire de coup de la panne, ils en seront donc pour leurs frais ( en plus il répare tout, même les gogues de l'ISS, en blaguant, évidemment). Ses longues études brillantes et sans échec vous expliqueront aussi ce chemin en ligne droite vers l'élite, contrairement aux nôtres, souvent plus hiératiques, qui ont débouché souvent sur des boulots obscurs, voire lassants quand ce n'est pas directement chez Popaul.

 

Lorsque vous apprendrez qu'il parle cinq langues et qu'il en travaille une sixième, ça commencera peut-être à vous gratter un peu. Bon vous n'irez pas le chambrer vu votre niveau d'anglais première langue au bout de sept années de pratique minimum, et faites gaffe, il est ceinture noire de judo, vous ne pourrez pas vous aligner avec votre pénible heure de gym par semaine, ou pire, vos heures de sport sur console et/ou écran.

 

Il a même bon fond et grand cœur, Thomas. Outre ses messages généreux et réguliers sur le respect de la planète avec la sainte science amie de l'homme et du progrès (gnia-gnia), sujets clivants qui ne risquent certes pas de nous déranger, quoique. Il sait même se rendre hyper disponible avec les écoliers, plus efficace que le meilleur des profs de sciences sorti major de l'agrégation. Un monstre gentil et savant, je vous dis, mais humble et simple, toujours. Il était même le parrain du bateau de Tanguy de Lamotte au profit des enfants atteints de maladies cardiaques, navigateur du Vendée globe...qui a cassé son mât sur cette course, abandon, un mot que ne connaît pas Thomas Pesquet. Oui, le doute n'est pas permis chez lui, un cargo spatial ravitailleur se grille dans les nuages, questionné là-dessus Thomas relativise tout de suite en constatant que les stocks de l'ISS sont suffisants pour achever sa mission sans soucis. Imparable, puis le sourire en coin, toujours, vous n'y arrivez pas vous, devant le quotidien de votre vie, hein, ben lui devant son extraordinaire destin, si. Un brin énervant. S'il prend quelque chose pour être comme ça, je veux et exige le nom de ses cachets, même illégaux, j'irai de suite m'en procurer car je sais déjà comment....euh, non rien. Reprenons.

 

Oui, les gênes révolutionnaires sommeillant (beaucoup trop ces temps-ci, à mon humble avis) en chacun de nous depuis 1789 nous titilleraient bien un peu pour aller chercher des poux dans la tête très, trop, propre de Thomas. Oui, on veut des héros , loin de la vérité mesquine, des héros qui fascinent, voire des héroïnes (petite digression féministe qui va bien) , mais plus de roi, ah ça ! Non !

 

J'aimerais si c'était possible, aller derrière le rideau du décor pixelisé autour de Thomas, gratter, montrer un peu de failles, juste pour lui éviter les chevilles qui enflent, dans l'espace c'est connu, mais faudrait pas que cela se prolonge au retour.

L'humaniser un peu, voir le perfectible qui est en lui. Oh, je ne lui souhaite pas une enquête de Médiapart révélant ses liens avec les banques martiennes, ni les trolls insoumis sur ses activités webiennes, ou d'être entré en contact fiscal avec le paradis là-haut, aussitôt dénoncé par le Canard enchaîné, non, un peu d'humanité autre que sympathique qui ne lui permette pas la grosse tête, quoi.

 

A son retour, je voudrais juste qu'il ne devienne pas ministre, politicien ou conférencier à cent mille, la notoriété rendant fou. J'espère qu'il saura en revenir et atterrir dignement, sans se perdre et pas seulement dans les steppes russes.

 

Puis je voulais aussi relativiser l'usage que nous faisons du progrès et de la science. Les guerres mondiales, les révolutions industrielles et l’avènement du libéralisme, nous montrent combien l'homme, son génie, ses capacités, ont si souvent été utilisés à sa propre perte, pour le gain de quelques uns, toujours les mêmes. L'homme a ainsi réussi en un peu plus d'un siècle à atteindre à la durabilité de sa planète plus qu'en six mille ans de civilisations diverses et variées.

Les premières fusées tombèrent sur Londres, ne l'oublions pas. Le militaire et les puissances mondiales se sont emparés de la conquête spatiale, qui nous est toujours présentée aujourd'hui ainsi, alors que Thomas vit une exploration, nuance, mais il travaille bien à la préparation de l'humain à la conquête de nouveaux territoires, de nouvelles richesses... et de leur si difficile futur partage.

Sans compter, que les inventions miracles telles le nucléaire ou la génétique, qui solutionnent certains de nos problèmes en posent d'autres bien plus dangereux, et doivent donc continuer d'être questionnées. Quand au progrès du numérique, si on voit bien les applications de partage et d'échange qu'il permet , ou la disparition de tâches fastidieuses qu'il génère, on constate aussi son recyclage économique sur le travail des hommes et la préemption immédiate de ses nouveaux biens par la rente, qui sont autrement plus néfastes à notre devenir. Mais Thomas ne fait pas de politique, dommage.

 

Pour finir sur une note pesquetienne, on pourrait faire le vœu -très, mais très pieux- que les hommes arriveront un jour à vivre en paix et à faire les efforts nécessaires pour y parvenir. Oui, ils y parviennent sur l'ISS, elle reçoit des spationautes de toutes nationalités sans qu'ils s'entretuent, et pour quelques années encore, alors que sur terre, leurs mêmes États se combattent et laissent les pires horreurs se commettre au nom de leurs intérêts géo-politiques.

 

Allez Thomas, promets-moi de cracher un peu dans la soupe, un jour, juste pour nous faire réfléchir un peu plus loin en ajoutant du subversif à ton travail d'utilité publique. Même avec une image trop lisse, les histoires d'amour finissent mal, en général, comme dirait Rita.

 

 

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17/12/2016
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